Vous rêvez de pagayer sur les plus belles rivières de France, mais vous ne savez pas si vous avez le droit d’aller partout. Il est légitime de se poser la question.
Plans d’eau, cours d’eau, canaux, mer… Le paysage aquatique français est très diversifié. Se pose également la question de savoir qui est propriétaire: l’état, un particulier? Le kayak est-il autorisé partout? Et comment le concilier avec les autres activités nautiques?
Peut-on faire du kayak librement? Par principe, oui on peut faire du kayak librement en France. Le droit français reconnaît une liberté fondamentale: celle d’aller et venir. Et elle s’applique à la pratique du kayak.
Malgré tout, la réglementation nationale reste parfois floue. Et dans les faits, on ne peut pas faire du kayak aussi librement que cela. Car l’eau est un bien partagé. Et d’autres activités sportives ou de loisirs, des activités industrielles ou agricoles, et le transport fluvial ou maritime cohabitent avec le kayal. Et il faut pouvoir accéder à l’eau. L’accès n’est parfois possible qu’en passant par des propriétés privées, ce qui complique encore les choses.
Les kayakistes peuvent emprunter tous les chemins d’accès au cours d’eau librement.
Pour accéder à l’eau, il n’y a pas moulte possibilités. Vous devez emprunter soit la voie publique, soit une voie privée. Il faut qu’elles soient ouvertes au public. L’accès par voie publique ouverte ne pose pas de problème.
En ce qui concerne les voies privées, vous pourrez entrer à pied sur un terrain privé non clôturé ou sans interdiction claire de pénétrer pour vous rendre au cours d’eau. Pour les véhicules, en plus des conditions précédentes, il faut que le chemin soit identifié et praticable (largeur, entretenu…). Tant qu’il n’y a pas interdiction claire du propriétaire, par clôture, par pancarte ou par oral, vous pouvez y aller.
Des décisions de justices constantes vont en ce sens depuis une décision de la cour de cassation de 1854.
Mais certaines zones ne sont accessibles que par des voies non ouvertes au public, en particulier sur des terrains privés. Comment faire dans ce cas?
Depuis une loi sur l’eau de 2006, les collectivités locales (mairie, département) peuvent mettre en place une servitude d’accès sur un terrain privé lorsqu’il n’y a pas d’autre solution pour accéder au cours d’eau. La servitude doit être acceptée par la propriétaire.
Il y a servitude sur les berges qui appartiennent aux propriétaires privés (les cours d’eau appartiennent à l’Etat).
On peut faire du kayak librement sur les cours d’eau
L’eau est une chose commune qui ne saurait être faire l’objet d’appropriation privée. Qu’il s’agisse de cours d’eau relevant du domaine public ou du domaine privé, plans d’eau et lacs, un kayak peut circuler librement selon le code de l’environnement et le Règlement Général de Police de la Navigation.
Si l’eau appartient à tous, sur le domaine privé, le lit appartient au propriétaire. Malgré tout, les engins nautiques non motorisés, donc les kayaks, ont le droit de circuler librement, voire même d’accoster pour une courte durée. La jurisprudence est constante.
Mais cela ne vaut pas pour les eaux qui ne sont pas alimentées par des eaux courantes provenant d’un autre cours d’eau. Un étang artificiel ou créé naturellement au fil du temps fait partie de la propriété privée sur laquelle il se trouve. Une personne ne peut donc y faire du kayak librement, sans l’accord exprès du propriétaire. Mais à défaut d’interdiction explicite comme vu plus haut, vous pouvez accéder.
On peut faire du kayak librement sur la mer
L’ensemble de l’espace maritime appartient à l’Etat: sol et sous sol, rivage, étang salés communiquant avec la mer. L’accès piéton au rivage est libre sauf interdiction pour des raisons de sécurité ou de protection de l’environnement.
Le code de l’urbanisme prévoit 2 servitudes, le long du rivage (longitudinale) et pour accéder au rivage (transversale). Cette dernière peut même être mise en place sur terrain privé par l’autorité administrative.
Gardez bien à l’esprit que en dessous de 3,50 mètres de longueur, un kayak est considéré comme un engin de place et ne peut s’éloigner à plus de 300 mètres d’un abri, endroit ou le kayakiste peut accoster et débarquer sans aide extérieure. Au delà de 3,50 mètres, des mesures de sécurité spéciales s’appliquent: navigation à 2 miles maximum d’un abri, port d’un gilet de sauvetage, présence d’un bout d’amarrage avec mousqueton de la longueur du kayak et d’une pagaie de secours notamment.
La limite à la liberté de faire du kayak pour raison de sécurité
C’est le préfet et non le maire qui peut restreindre la pratique du kayak pour raisons de sécurité. Le maire ne peut intervenir qu’en cas de péril imminent ou de fléau calamiteux: rocher qui menace de s’effondrer par exemple, pollution grave des cours d’eau ou crue exceptionnelle. En cas d’arrêté préfectoral ou exceptionnellement municipal interdisant les navigations sur les voies navigables, vous ne pouvez plus y faire du kayak librement. Quoiqu’il arrive, un tel arrêté est temporaire et ne saurait durer au-delà de la fin des risques pour la sécurité des personnes et des embarcations.
Sur la mer, c’est le préfet maritime qui décide de limiter la liberté de naviguer, au-delà de 300 mètres de la côte. Dans les 300 mètres, il reste compétent pour les engins motorisés ou non motorisés mais immatriculés. Pour les engins non motorisés et non immatriculés, c’est le maire qui est compétent.
La limite à la liberté de faire du kayak pour conciliation des différentes activités sur l’eau
Il se déroule de nombreuses activités sur l’eau, qu’elles soient pour le loisir (pêche, baignade…) ou pour le commerce (transport de personnes ou de marchandises…).
Encore une fois c’est le préfet qui est compétent pour réglementer la cohabitation des différentes activités, notamment kayaking et pêche. Ainsi des créneaux horaires réservés à l’un et à l’autre peuvent être mis en place. Certains secteurs peuvent être purement et simplement interdits aux kayaks. Mais si la possibilité de faire du kayak est limitée, celle de pêcher doit également l’être. La conciliation doit aller dans les deux sens.
La pratique du kayak peut également être limitée par l’aménagement ou l’exploitation d’ouvrages. Mais des mesures permettant l’usage nautique doivent être mises en place (contournement notamment). Ces ouvrages doivent être correctement signalés.
Enfin en cas d’opérations d’entretien, on ne peut pas toujours faire du kayak librement, pour des raisons de sécurité.
La limite à la liberté de faire du kayak pour la protection de l’environnement
Le préfet peut prendre un arrêté limitant la liberté de faire du kayak pour des considérations environnementales. Néanmoins, les raisons invoquées doivent être réelles et non potentielles. De nombreuses études ont en effet démontré l’impact quasi inexistant de la pratique du kayak sur l’environnement. A contrario, l’impact de la pêche sur l’environnement est avéré (voies d’accès, piétinement, dérangement de la faune etc…)
Conclusion
Si le principe est que l’on peut faire du kayak librement, je vous conseille tout de même de prendre vos précautions avant de vous lancer: nul n’est censé ignorer la loi. Et la liberté de pratiquer le kayak peut en certaines circonstances être limitée. Renseignez-vous auprès des maires et préfectures. Les arrêtés sont affichés et consultables, parfois même sur internet.
Si vous souhaitez aller plus loin et avoir plus d’informations, je vous conseille également le site de la Fédération Française de Canoë Kayak où un Mémento juridique du kayak est consultable, avec les textes de lois et la jurisprudence en la matière.